– mercredi 21 mai 2025 à 19h
« L’histoire, si elle a été dure, n’a pas toujours été triste. Elle raconte des vies qui n’ont pas été cantonnées dans l’étroitesse d’une nation, ou pire encore d’une nationalité. Et alors que tant de choses étaient volontairement orientées vers la laideur, des hommes et des femmes les ont, plus d’une fois, dans un geste collectif, sublimées. J’en tiens toutes ces histoires pour preuve. » En déambulant dans Barbès, Hajer Ben Boubaker raconte les petits détails et les grands événements qui ont fait du quartier la « maison-mère des luttes de l’immigration » et l’une des places fortes de la musique maghrébine.
Dans les cartons d’archives sur le premier quartier algérien dans le 5e arrondissement, dans les voix de vieux messieurs qui racontent l’habitude d’une ville ou dans les souvenirs imprécis de luttes contre le racisme, Barbès Blues ressuscite des personnages, des épopées, des anecdotes et des tragédies. Autant de symboles d’une communauté de destin, l’immigration maghrébine, qui dans un dédale de rues minuscule, s’est construit un monde immense.
« Je m’appelle Malika Rahal et je suis une historienne du temps présent, de ce temps dont les témoins et acteurs sont encore en vie. » Quels chemins la petite fille d’une atypique famille d’immigrés a-t-elle empruntés pour en arriver là ? Connue pour ses recherches sur l’Algérie contemporaine, Malika Rahal nous livre un texte très personnel, dans lequel les vivants et les morts de son histoire se mêlent à ceux de ses enquêtes. Au fil de ces pages où pointent la colère et l’urgence face à la colonisation et à la guerre, les enjeux de transmission de la culture et de la mémoire rythment un récit vibrant, attentif aux détails des lieux et des objets de la vie courante. Lorsqu’elle ouvre le placard à épices de sa cuisine, écoute les disques vinyle de ses parents ou regarde les photos de famille, c’est toujours en historienne : elle fait le lien avec sa pratique d’enseignante et de chercheuse, interroge son rapport aux témoins et à leurs récits, et explore ses engagements. Son livre est une réflexion puissante sur l’écriture de l’histoire du temps présent, « fût-ce au milieu de la guerre ».